MAXIME, CHAPITRE UN : LA RENCONTRE
- SiTuM'aimes
- 23 avr. 2019
- 5 min de lecture
Dernière mise à jour : 30 avr. 2019
Maxime Gaget est l'auteur de "Ma compagne, mon bourreau", paru aux éditions Michalon en 2015. Il y relate les années de violences conjugales qu'il a subies de la part de sa compagne.

" Je vais exposer dans ces lignes un sujet qui n’est nullement évident à aborder, à savoir une situation de violences conjugales dans laquelle les rôles sont quelque peu « inversés » par rapport aux stéréotypes en vigueur. Ce véritable tabou en la matière ne veut pas dire que, parce que très peu d’hommes osent en parler, cela n’existe pas pour autant. Gêne, honte, peur, font partie des très nombreuses embûches dans ce type de marasmes à la limite du cauchemardesque. A l’heure actuelle, il n’existe – à ma connaissance – aucune structure ou service d’entraide digne de ce nom pour les hommes victimes.
Sur le plan du parcours général, il est vrai que mon cursus est un peu atypique : Scolarité assez classique, diplôme de technicien Moules et modèles en poche en 1999 (diplôme de classe IV, soit bac et équivalents), service militaire dans la foulée (excellente expérience, dont je garde un assez bon souvenir, même si cela a par moments été un peu dur, en tout cas sur le plan physique). Derrière cela, j’ai embrayé avec pas mal de petits boulots, principalement en intérim, et cela a été une période assez… pénible, surtout moralement. C’est ce qui m’a incité à « changer d’air » en optant pour une reconversion professionnelle. A cette époque, j’étais en relation via Internet avec une jeune femme, d’origine marocaine, dont j’étais particulièrement épris (nous nous sommes connus en 2003). Cette formation, à terme, devait notamment me permettre de pouvoir concrétiser l’avenir entre nous. Mais, cela ne s’est malheureusement pas fait, étant donné qu’en plein milieu de ma formation au centre AFPA de Champs s/ Marne (région parisienne), elle décide – sur ce qui s’est manifestement avéré être un coup de tête – de mettre fin à notre relation, avec toutes les conséquences que cela a pu impliquer derrière.
Cette nouvelle a été pour moi comme un gigantesque coup de massue. Cela m’a profondément affecté, au point que cette funeste nouvelle mette directement en danger mes chances de réussites pour le diplôme que je préparais pourtant avec assiduité depuis de longs mois déjà.
C’est là qu’arrive Nadia, environ deux mois plus tard, tandis que j’avais à peine moralement remonté la pente (avec une certaine violence, étant donné que je me suis mis quelques coups de pieds aux fesses pour remonter la pente aussi vite que possible). Premier contact via Internet, tout ce qu’il y a de plus normal, classique et anodin, et, entre nous, les choses se sont précisées assez vite… à dire vrai, dangereusement trop vite. Etant totalement néophyte en la matière à ce moment précis de ma vie, je n’ai absolument rien vu du danger que représentait pourtant la situation. D’une certaine manière, j’étais un peu comme un touriste nautique totalement novice, sur son frêle esquif, entraîne par de forts vents en direction d’une tempête aux proportions épiques - sans toutefois la voir distinctement, par manque de connaissances et d’expérience.
Juillet 2007, soit environ 3 mois après que l’on ait fait connaissance, je vois Nadia pour la première fois. Nous avons tous deux été conviés par un ami commun à un barbecue, en soirée. Le moment était tout à fait propice pour se voir enfin quelques heures en amont de ces festivités. Cette dernière a eu un petit peu de retard. Quand je l’ai aperçue, une petite voix intérieure m’a immédiatement enjoint de prendre mes affaires et… mes jambes à mon cou sans me retourner. Aussi invraisemblable que cela puisse paraître, je suis passé outre ce premier signal d’alarme très explicite, que m’envoyait pourtant mon intuition avec un empressement totalement inédit jusqu’à ce fameux jour. Elle était vêtue d’un Bombers, de Jeans, d’un T-shirt et avait aux pieds une paire de baskets. Tout le contraire de ce que je m’étais imaginé au départ.
Elle était venue avec une de ses amies, d’une vulgarité – il est vrai – assez prononcée. Passé la première « surprise », elles m’ont rejoint à ma table, et nous avons dialogué quelques heures derrière un verre. L’heure H arrivant, nous nous sommes rendus à cette fameuse soirée, avec un petit peu d’avance sur l’horaire, ce qui nous a permis de participer aux préparatifs. Les autres convives arrivent les uns après les autres, tous appartenant au site grâce auquel nous nous connaissions. C’est assez convivial, les discussions vont bon train.
En plein milieu de la soirée, sans que quiconque ne comprenne la raison, Nadia et son « amie » ont une prise de bec assez violente, et celle-ci quitte – assez remontée – les lieux, tandis que Nadia, visiblement heurtée et en peine, s’effondre. Cela jette un froid immédiat dans l’assistance, et notre hôte va la voir. Tout doucement, avec cependant un certain malaise, le niveau sonore remonte à son niveau originel, et la situation revient à un semblant de normalité. Pour ma part, je reconnais que la voir ainsi m’avait profondément peiné pour elle… et cela a eu – quoiqu’indirectement – un assez gros impact pour la suite. Vous allez vite comprendre avec ce qui arrive.
Vers 22h, sachant que j’étais tributaire des transports en commun, il me fallait « lever le camp », et je me suis levé pour en informer notre hôte. Nadia était à proximité immédiate et a entendu notre dialogue. Immédiatement, elle s’est proposée de m’accueillir chez elle pour la nuit, chose sur laquelle je ne voyais aucun inconvénient particulier, en sachant qu’il n’était aucunement dans mes intentions d’entreprendre quoi que ce soit. A plusieurs reprises, celle-ci a insisté sur le fait que rien ne se passerait. Avec un peu de recul, cette étrange et forte insistance aurait dû là aussi m’alerter quant à ses intentions futures. Mais, là encore, ma méconnaissance totale de ce volet de vie a lourdement jouée en ma défaveur : la sagesse m’aurait recommandé de décliner cette proposition, afin d’en rester là. Naïveté, naïveté, quand tu nous tiens…
Je suis donc resté un peu plus longtemps, et à l’heure venue (il était quelque chose comme 4 ou 5h, si ma mémoire ne me fait pas défaut), un convive nous dépose très aimablement dans la rue de Nadia avec son véhicule personnel. Arrivés dans son studio, nous n’avons pas tardé à nous installer dans son clic-clac. Pour ma part, de par mon flagrant manque d’expérience, je n’en menais pas large. Etant un homme de principe, j’étais bien déterminé à respecter mes engagements. Elle me demande de me rapprocher d’elle, et de la prendre dans mes bras. Ça se complique passablement. Cette mince frontière, dont nous avions pourtant communément convenu du tracé, a été franchie…. Par ses soins !
Le lendemain matin, je lui ai confié, penaud, qu’il s’agissait de ma toute première fois, j’avais à peine 29 ans. Je n’oublierai jamais le sourire absolument lumineux qui a immédiatement pris place sur son visage. Pour tout vous dire, cet instant précis est peut être le seul et unique bon moment que je garde en mémoire la concernant. Parce que les choses vont peu à peu se gâter. Mais pas tout de suite, non. Pas encore. "
Comments