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VIOLENCES INTRAFAMILIALES : DISPOSITIFS MIS EN PLACE ET PARTENARIATS

  • SiTuM'aimes
  • 2 mars 2019
  • 5 min de lecture

Laurent Kerdoncuff est lieutenant-colonel et chef du bureau « Sécurité Publique, Partenariats » à la région de gendarmerie du Pays de la Loire. Il s'occupe entre autres du développement des partenariats avec différents acteurs institutionnels et associatifs, et d'animation d'actions de prévention de la délinquance, dont les violences intrafamiliales. Son équipe est composée de 10 sous-officiers, dont 3 qui animent la brigade de protection des familles, assistés de 2 jeunes en service civique. Avec eux, il a mis en place un dispositif innovant de rappel téléphonique des victimes.




Laurent Kerdoncuff lors de l'assemblée des Maires de Loire-Atlantique


SdC : Monsieur Kerdoncuff, comment les gendarmes sont-ils formés à l'accueil des victimes de violences intrafamiliales ? L.K. : En fait, ils ne sont pas formés à l'accueil de ces victimes en particulier. Un sous-officier de gendarmerie reçoit une formation à l'accueil du public et des victimes d'infraction en école de formation initiale. C'est un module d'environ 35 heures par an. Il participe également à un autre module, sur l'éthique et la déontologie.

Donc ici, au niveau de mon service, nous mettons en place une action de formation continue sur l'accueil du public et des victimes d'infraction au sens large, en partenariat avec l'ADAVI (l'Association D'Aide aux Victimes d'Infraction) et l’association Prévenir et Réparer. Et ce dans un souci de qualité, afin que tous les gendarmes puissent accueillir les victimes et leur apporter les réponses les plus appropriées, qu'ils soient en capacité de les orienter.

Nous convoquons tous les mois des gendarmes pour les former à l'accueil du public. C'est fondamental pour nous.

SdC : Ces sessions de formation ne sont pas les seuls dispositifs que vous avez mis en place au niveau départemental. Pouvez-vous m'en dire plus sur le dispositif d'appels téléphoniques ? L.K. : C'est un dispositif innovant que nous avons mis en place ici, en Loire-Atlantique. Mon équipe est composée de trois sous-officiers, et cela fait trois ans que je m'appuie également sur des jeunes en service civique.

Concrètement, les deux engagés du service civique sont chargés, en liaison avec les gendarmes référents, d'évaluer quotidiennement les situations qui sont relevées lors des interventions des gendarmes. Dans un délai de 48 heures, nous nous engageons à rappeler les victimes et les usagers. Nous ne le faisons pas uniquement pour les violences intrafamiliales, car nous pouvons aussi relever les situations de personnes suicidaires, des tapages nocturnes, de conduites addictives, etc.

Mais dans le cadre des violences intrafamiliales, nous rappelons les victimes, en nous assurant qu'elles ont reçu des informations suffisantes lors de l'intervention des gendarmes. Nous complétons ensuite cette information, si besoin, et compte tenu de la situation : soit nous leur communiquons les coordonnées d'associations comme l'ADAVI, le CIDFF, Solidarité Femmes, soit nous leur proposons un rendez-vous avec des intervenantes sociales, en gendarmerie, pour déposer plainte.

SdC : Comment savoir quels usagers rappeler ? L.K. : Nous nous appuyons sur les compte rendus d'interventions des gendarmes. Il y a un certain nombre de mots clés (« menaces », « chantage », « violences », «dégradations », « présence d'enfants ») qui nous font dire qu'il y a un besoin d'informations supplémentaires, un besoin de précisions.

Mais la plupart du temps, les situations sont très bien traitées sur le terrain par les gendarmes, et donc cela ne nécessite pas forcément un appel. Nous avons eu 2883 interventions de gendarmes en 2018 dans le cadre des violences intrafamiliales, et nous n'avons dû rappeler que 524 personnes, donc fort heureusement les gendarmes font du bon travail de terrain.


SdC: Avez-vous des résultats intéressants ? L.K. : Oui, très intéressants, car les gens sont surpris de la démarche, le fait que la gendarmerie revienne vers eux et se préoccupe de la suite qu'ils veulent donner à leurs démarches. C'est encore difficile de mesurer l'impact, mais en 2018, comme je vous le disais, 524 appels téléphoniques ont été passés uniquement pour les violences intrafamiliales. Et 294 personnes ont répondu favorablement à l'offre de service. Il y a en effet des gens qui ne répondent pas, ou qui estiment qu'ils n'ont pas besoin d'aide complémentaire.

Mais ce dispositif est utile pour bien les informer sur leurs droits et créer du lien avec les différents partenaires qui peuvent leur apporter une aide ou une réponse appropriée.

Cela permet aussi de soulager les gendarmes en brigade, puisque nous nous chargeons de faire un retour de ces appels aux gendarmes qui sont intervenus. Cela leur indique si les gens ont apprécié l'intervention ou pas.

SdC: Y a-t-il aussi des dispositifs de prise en charge spécialement pour les enfants ? L.K. : Il est important pour nous de pouvoir entendre la parole des enfants aux prises avec les violences intrafamiliales. Nous les entendons donc dès l'instant où ils ont une capacité à écouter une question et apporter une réponse.

Il existe les auditions Mélanie, des auditions de mineurs victimes mises en place dans le cadre des atteintes sexuelles sur mineurs. C'est un entretien avec l'enfant, filmé. Il y a ensuite une retranscription pour le magistrat, afin que celui-ci puisse se faire une idée sur ce que vit l'enfant au travers de ses déclarations verbales, de son attitude, de ce qu'il a pu décrire au travers de ces entretiens filmés. Cette technique peut donc aussi être utilisée dans le cadre des violences intrafamiliales.

SdC : Un dispositif est aussi mis en place grâce à votre partenariat avec le CIDFF de Loire-Atlantique, pouvez-vous m'en parler ? L.K. : Le CIDFF est le Centre d'Information sur les Droits des Femmes et des Familles.

D'une part, c'est un partenaire en terme d'orientation pour les usagers et les victimes, puisque c'est le partenaire idéal pour les femmes et les familles.

D'autre part, c'est aussi un partenaire en terme de formation des personnels. Tous les ans nous organisons une session de formation de nouveaux référents « Violences Intrafamiliales » avec le CIDFF. C'est un module de formation de deux fois deux jours.

Le premier module est animé d'abord par un psychologue, puis par un juriste du CIDFF qui intervient sur les notions de droit civil. En effet, les gendarmes sont formés, en formation initiale, en droit pénal, mais pas en droit civil. Les questions de divorce, de non-représentation d'enfants et d'abandon de famille sont donc abordées à cette occasion. Enfin, un représentant de la brigade des familles intervient pour présenter notre dispositif.

Le deuxième module consiste en des mises en situation avec une comédienne pour travailler sur la posture professionnelle, au titre de l'accueil, de la gestion des conflits et de la gestion de la victime en situation de crise.

Les gendarmes qui participent à ces modules sont des gendarmes volontaires, qui souhaitent se former sur ce sujet de la lutte contre les VI. Aujourd'hui, ce sont plus de 60 gendarmes dans le département de Loire Atlantique qui ont bénéficié de cette formation.

SdC : Quels sont vos autres partenariats ? L.K. : Nous travaillons beaucoup avec des associations d'aide aux victimes. Ici en Loire-Atlantique, nous avons l'ADAVI 44, qui fait partie du réseau France Victimes. elle est rattachée au tribunal de Nantes. Et le tribunal de St Nazaire, car nous avons deux tribunaux dans le département, travaille avec l'association Prévenir et Réparer. Nous travaillons aussi avec des intervenantes sociales, qui sont mises à disposition par le conseil départemental, et qui apportent une plus-value parce qu'elles font un travail d'accueil, d'information, d'écoute, d'orientation et d'aide au dépôt de plainte.



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